Jusqu’à sa majorité, la personne n’est pas considérée par la loi comme responsable de ses actes. C’est pourquoi l’intervention des parents est indispensable pour toutes les décisions qui concerne l’enfant ou ses biens. Mais à partir de l’âge de 18 ans, la personne devient majeure et est dès lors considérée comme capable « de tous les actes de la vie civile ».
 
Pour les personnes porteuses d’une déficience intellectuelle, cela poserait problème, si le législateur n’avait pas prévu une exception pour elles. Ainsi, le Code civil contient-il diverses dispositions qui visent à protéger les personnes qui ne sont pas capables de gérer leurs biens ou de se gérer elles-mêmes en toute autonomie.
 
Nous les résumons ici, tout en conseillant les personnes intéressées de consulter, le cas échéant, un professionnel.
 
Le code civil, qui est conforme aux dispositions de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, prévoit deux types de protection. Il distingue :
  • La protection extrajudiciaire, qui convient surtout aux personnes âgées, système dans lequel la personne concernée donne un mandat à une autre personne, appelée mandataire, afin qu’elle agisse pour elle et en son nom dans certaines circonstances (par exemple, dans les relations avec la banque). Nous n’en dirons pas plus ici.
  • La protection judiciaire, qui nécessite, comme son nom l’indique, l’intervention d’un juge, le juge de paix en l’occurrence. Cette intervention est indispensable du fait que la personne concernée n’est le plus souvent pas à même, ou en tout cas pas complètement, de décider de ce qui lui convient. C’est ce dispositif qui est à envisager pour les personnes porteuses du syndrome X fragile.

La protection judiciaire

Dans ce système, le juge désigne un administrateur qui sera chargé :

  • soit d’assister la personne à protéger ;
  • soit de la représenter et de gérer directement ses affaires.

La différence entre ces deux solutions réside dans l’interaction plus ou moins étroite entre l’administrateur désigné et la personne à protéger :

  • dans le cas de l’assistance, la personne à protéger est capable d’exprimer un avis et d’agir par elle-même, mais pas de manière autonome, et agit, sous le conseil et avec l’assistance de l’administrateur, la signature de ce dernier étant néanmoins indispensable sur tous les actes concernant la personne protégée et/ou ses biens ;
  • dans le cas de la représentation et de la gestion, la personne à protéger est incapable d’agir par elle-même et l’administrateur agit pour elle en tant que représentant et gère ses affaires à sa place.

Ce système comprend à son tour 2 domaines d’application :

  • la protection de la personne ;
  • la protection des biens.

Protection de la personne

Dans le cas de la protection de la personne, le juge de paix ne peut désigner qu’un seul administrateur, sauf s’il s’agit des parents – lesquels, surtout s’ils sont divorcés, seront toujours désignés conjointement. Dans son ordonnance, le juge précise quels sont les actes concernant concernant la personne qui nécessitent l’intervention de l’administrateur. Ainsi, le juge doit-il se prononcer explicitement sur la capacité de la personne à protéger :

  1. de choisir sa résidence ;
  2. de contracter mariage ;
  3. d’intenter une action en annulation d’un mariage et de se défendre contre une telle action ;
  4. d’introduire une demande de divorce pour désunion irrémédiable et de se défendre contre une telle demande ;
  5. d’introduire une demande de divorce par consentement mutuel ;
  6. d’introduire une demande de séparation de corps et de se défendre contre une telle demande ;
  7. de reconnaître un enfant ;
  8. d’exercer, soit en demandant, soit en défendant, des actions relatives à sa filiation ;
  9. d’exercer l’autorité parentale sur la personne d’un mineur et les prérogatives parentales ;
  10. de faire une déclaration de cohabitation légale et d’y mettre fin ;
  11. le cas échéant, de faire une déclaration en vue d’acquérir la nationalité belge ;
  12. d’exercer les droits à l’égard des traitements de données à caractère personnel ;
  13. d’exercer le droit de réponse ;
  14. d’adresser une demande de changement de nom ou de prénom ;
  15. de consentir à une expérimentation sur la personne humaine ;
  16. de consentir à un prélèvement d’organes ou de s’y opposer ;
  17. d’exercer le droit de refuser la réalisation d’une autopsie sur son enfant de moins de dix-huit mois ;
  18. de consentir à un prélèvement de matériel corporel sur des personnes vivantes ou de s’y opposer ;
  19. d’exercer des activités d’armurier, d’intermédiaire, de collectionneur d’armes ;
  20. de signer ou de s’authentifier au moyen de la carte d’identité électronique ;
  21. de faire la déclaration d’avoir la conviction que le sexe mentionné dans l’acte de naissance ne correspond pas à l’identité de genre vécue intimement.

Protection des biens

Dans le cas de la protection des biens, le juge de paix peut désigner une ou plusieurs personnes comme administrateur. S’il y en a plusieurs, il précise le rôle de chacun d’eux. Ici aussi, le juge doit explicitement se prononcer sur la capacité de la personne à protéger :

  1. d’aliéner ses biens ;
  2. de contracter un emprunt ;
  3. de donner ses biens en gage ou de les hypothéquer ainsi que d’autoriser la radiation d’une inscription hypothécaire, avec ou sans quittance, et d’une transcription d’une ordonnance de saisie-exécution sans paiement ;
  4. de consentir un bail à ferme, un bail commercial ou un bail à loyer ;
  5. de renoncer à une succession ou à un legs universel ou à titre universel ou l’accepter ;
  6. d’accepter une donation ou un legs à titre particulier ;
  7. d’ester en justice en demandant ou en défendant ;
  8. de conclure un pacte d’indivision ;
  9. d’acheter un bien immeuble ;
  10. de transiger ou conclure une convention d’arbitrage ;
  11. de continuer un commerce ;
  12. d’acquiescer à une demande relative à des droits immobiliers ;
  13. de disposer par donation entre vifs ;
  14. de conclure ou modifier un contrat de mariage
  15. de conclure ou modifier une convention ;
  16. de rédiger ou révoquer un testament ;
  17. de poser des actes de gestion journalière ;
  18. d’exercer l’administration légale des biens du mineur ;
  19. de conclure un pacte successoral autorisé par la loi ;
  20. d’exercer ses droits et obligations en matière fiscale et sociale ;
  21. de contracter des dettes périodiques.

Le cas échéant, le juge de paix précise dans son ordonnance quels sont les actes de gestion journalière visés au point 17 et si et à quelles conditions la personne protégée peut utiliser une carte bancaire pour poser ces actes.

Obligations de l’administrateur

Comme administrateur de personne et/ou de biens, le juge peut désigner les parents ou l’un d’entre eux, un frère ou une sœur, quelqu’un de la famille, un ami de la famille ou, ce qui arrive assez souvent, un avocat. Il peut aussi désigner une fondation privée qui se consacre exclusivement à la personne à protéger ou une fondation d’utilité publique qui dispose, pour les personnes à protéger, d’un comité institué statutairement chargé d’assumer des administrations.
 
Quoi qu’il en soit, l’administrateur de personne et/ou de biens doit agir pour le bien de la personne protégée. Il doit la rencontrer régulièrement, au moins une fois par an, et l’associe autant que possible à l’exercice de sa mission. Il doit aussi rendre compte au juge de son action, au moins une fois par an.
 
Pour certains actes, l’administrateur doit avoir l’autorisation préalable du juge.
 
Ainsi, l’administrateur de personne doit être spécialement autorisé par le juge lorsqu’il s’agit de modifier le lieu de résidence de la personne protégée ou de la représenter en justice en tant que demandeur.
 
De même, l’administrateur de biens doit être spécialement autorisé par le juge pour :

  1. aliéner les biens de la personne protégée, hormis les fruits et objets de rebut ;
  2. emprunter ;
  3. hypothéquer ou donner en gage les biens de la personne protégée ou autoriser la radiation d’une inscription hypothécaire, avec ou sans quittance, et d’une transcription d’une ordonnance de saisie-exécution sans paiement et de la dispense d’inscription d’office ;
  4. conclure un bail à ferme, un bail commercial ou un bail à loyer de plus de neuf ans, ainsi que pour renouveler un bail commercial ;
  5. renoncer à une succession ou à un legs universel ou à titre universel ou l’accepter, ce qui ne pourra se faire que sous bénéfice d’inventaire. Le juge de paix peut, par une ordonnance motivée, octroyer l’autorisation d’accepter une succession, un legs universel ou à titre universel purement et simplement, compte tenu de la nature et de la consistance du patrimoine hérité et pour autant que les bénéfices soient manifestement supérieurs aux charges du patrimoine hérité ;
  6. accepter une donation ou un legs à titre particulier ;
  7. représenter la personne protégée en justice en demandant dans les procédures et actes, sauf pour :
    • certaines procédures et certains actes ;
    • les constitutions de partie civile ;
    • les litiges relatifs aux contrats locatifs ou à l’occupation sans titre ni droit, et ;
    • les demandes d’application de la législation sociale en faveur de la personne protégée ;
  8. conclure un pacte d’indivision ;
  9. acheter un bien immeuble ;
  10. transiger ou conclure une convention d’arbitrage ;
  11. continuer un commerce. L’administration du commerce peut être confiée à un administrateur spécial sous le contrôle de l’administrateur des biens. L’administrateur des biens spécial est désigné par le juge de paix. Le juge de paix peut à tout moment retirer son autorisation de continuer le commerce;
  12. aliéner des souvenirs et autres objets à caractère personnel, même s’il s’agit d’objets de peu de valeur ;
  13. acquiescer à une demande relative à des droits immobiliers ;
  14. autoriser les prestataires de services de paiement à apposer tout signe distinctif sur les instruments de paiement de la personne protégée ;
  15. conclure un pacte successoral autorisé par la loi, en qualité d’héritier présomptif, ledit pacte ne pouvant toutefois emporter, dans le chef de la personne protégée, renonciation à des droits dans une succession non ouverte.

La personne de confiance

La personne à protéger ou protégée a le droit d’être soutenue, pendant toute la durée de l’administration, par une personne de confiance qu’elle a désignée personnellement, si elle en est capable, ou qui est proposée par un tiers dans son intérêt.
 
Le juge qui prononce une mesure de protection peut aussi homologuer la désignation de cette personne de confiance ou en désigner une d’office.
 
Le rôle de cette personne est d’assister la personne protégée dans ses relations avec :

  • le juge lui-même ;
  • le ou les administrateurs ;
  • les services sociaux.

Cette personne de confiance est entièrement indépendante et jouit d’une totale liberté d’action. Elle reçoit tous les rapports émis par le ou les administrateurs et est tenue au courant de tous les actes d’administration qu’il(s) rempli(ssen)t. Dans les cas prévus par la loi, la personne de confiance exprime les souhaits de la personne protégée, si cette dernière n’est pas en mesure de les exprimer elle-même. La personne de confiance aide la personne protégée à exprimer son avis, si cette dernière n’est pas en mesure de l’exprimer de manière autonome. Elle veille au bon fonctionnement de l’administration

Que retenir en pratique ?

En tant que parents d’un enfant X fragile, il est important que vous songiez à la mise en place de ce système de protection, au moment où votre enfant approche de l’âge adulte. Vous pouvez à cet effet adresser une requête au juge de paix du lieu de résidence de votre enfant, afin qu’il prenne une ordonnance de protection. Vous ne devez pas nécessairement passer par un avocat pour ce faire, mais cela peut être utile.
 
Dans cette requête vous pouvez demander à être désignés conjointement comme administrateurs de personne et de biens pour votre enfant ou désigner la personne que vous souhaiteriez voir assumer ce rôle. Vous pouvez aussi préférer une autre solution, comme par exemple décider de créer une fondation dont le rôle sera d’administrer votre enfant et ses biens et demander au juge de le confirmer.
 
Rien n’étant définitif, il vous sera toujours possible d’adresser plus tard au juge une nouvelle requête en vue de modifier les choses.

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Si vous souhaitez en savoir plus, vous pouvez consulter ici le texte du code civil qui contient toutes ces dispositions.

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